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par Leana Quilici et Renzo Ragghianti

Lettres curieuses sur la Renaissance Orientale des frères Humboldt, d'August Schlegel et d'autres...

Guillaume Pauthier

Note editoriali

Index | Avertissement | Bopp | Burnouf | Friedrich Creuzer | A. von Humboldt | W. von Humboldt
Mohl | Pauthier | Rosen | de Sacy | Schlegel | Windischmann | Appendice

1

Je vous remercie beaucoup, M. Conseiller de l'article bienveillant que vous avez donné à l'Europe littéraire sur ma Traduction des Essais sur la philosophie des Hindous de Mr. Colebrooke que je suis très satisfait de voir élevé au titre de Sir que vous lui donnez, sans doute, d'après des autorités officielles que je ne connoissois pas(1). Je regrette que vos opinions concernant Lao-tseu et ses commentateurs n'aient pas changé, parce que les miennes sont le résultat d'une conviction profonde que mes études de chaque jour ne font que confirmer. Mais néanmoins l'expression que vous avez donnée à votre opinion étant celle d'une conviction égale, je n'en suis nullement blessé, et j'aurois d'autant moins raison de l'être que cette opinion est exprimée avec toute la politesse et les égards que l'on doit toujours aux travaux consciencieux, fussent-ils même erronés.

Agréez, Monsieur, l'expression de ma considération très distinguée.

G. Pauthier

Paris le 9 Août.

Rue St. Georges N°13

P. S. Si vous ne vous proposez pas de rendre compte dans l'E. litt. de la nouvelle édition du Dictionnaire Sanskrit de Wilson que je viens de recevoir de sa part, et de son 2e art. sur les sectes des Hindous, inséré dans le 17e vol. des As. Res. je me ferois un devoir de reconnoissance de les annoncer moi-même.

 

2

A Monsieur le Rédacteur du nouveau Journal Asiatique,

Monsieur,

Permettez-moi de faire deux observations sur la Réplique N°1 que Mr. Klaproth vient de faire insérer dans le Journal asiatique, mois de Septembre. Je ne serai pas long(2).

Dans une Lettre insérée au Journal Asiatique (mois d'août) on m'a fait commettre à l'impression plusieurs fautes qui n'auroient pas existé sans une cause que Mr. Klaproth me force à regret à révéler.

Mr. Klaproth est de la Commission du Journal Asiatique; Mr. Klaproth sait que cette Commission, dont il fait partie, m'a réfuté (contrairement à tous les usages et Mr. Klaproth doit par expérience le savoir mieux que personne) de revoir les épreuves de ma Lettre, en me garantissant qu'elle seroit imprimée textuellement; Mr. Klaproth d'ailleurs avoit lu ma lettre avant l'impression puisqu'il a eu la générosité de donner à la Commission son imprimatur; Mr. Klaproth a reçu en outre un exemplaire de ma lettre tirée à part et dont j'ai pu revoir une nouvelle épreuve; Mr. Klaproth savoit donc positivement, indubitablement que la bévue d'avoir pris un nom de livre pour un nom d'auteur, en disant: Le Dictionnaire DE Sin-tseu-tsian, au lieu du Dictionnaire Sin-tseu-tsian ne provenoit pas de moi, car je puis assurer qu'elle ne se trouve pas dans mon manuscrit qui est encore entre les mains de la Commission. Je demande maintenant de quels termes on doit qualifier la critique de Mr. Klaproth?

Une note insérée page 232 tendroit à faire croire que j'ai voulu m'attribuer la découverte du nom de Brahma en chinois, et l'on dit que c'est à Mr. Abel-Rémusat que cet honneur est dû; mais est-ce que j'ai jamais voulu le lui ravir? Au contraire, n'ai-je pas toujours cité Mr. Rémusat comme autorité sur laquelle je fondois mon opinion? Je trouve donc cette insinuation bien étrange.

Quant à l'invitation que me fait Mr. Klaproth page 237, d'apprendre à lire avec les enfants chinois dans le livre magnifiquement publié par Mr. Le baron Schilling de Canstadt(3), elle est de si bon goût que j'aurois grand plaisir à recevoir des leçons de ce savant et docte orientaliste s'il avoit un peu plus d'usage de la bonne compagnie; j'attendrai qu'il ait lu un autre petit ouvrage que l'on fait apprendre aux enfants dans nos écoles et imprimé, non pas magnifiquement il est vrai, mais très modestement en lettres gothiques, ayant pour titre: Civilité puérile et honnête, ou principes pour se conduire honnêtement dans le monde. Après cela nous verrons(4).

Je ne veux pas rentrer ici dans une discussion fort peu intéressante, ou plutôt insipide, pour la très grande majorité des lecteurs. Je me bornerai à dire que, lorsqu'il aura épuisé tous les Nos de ses répliques, et qu'il aura reçu de Londres ou d'ailleurs les raisons et les preuves qu'il doit opposer à ma prétendue réponse, je montrerai combien on doit ajouter de foi à sa prétendue réplique, où, il faut le dire, perce assez rarement le naturel de Mr. Klaproth, mais où l'on reconnoit parfois une plume habituée aux discussions polies. En attendant, Monsieur le Rédacteur, je compte sur l'insertion de cette lettre dans le prochain N° du Journal Asiatique.

J'ai l'honneur d'être avec une considération bien distinguée,

Monsieur,

Votre très humble et très dévoué serviteur
G. Pauthier

Paris, les 7 novembre 1831.

Rue de Londres N° 6.

(1) La traduction de Pauthier précédait de quatre ans la publication en volume des Essais d'abord parus dans les Transactions de la Société asiatique de Londres. Cf. aussi la lettre que Pauthier adressera à Cousin le 21 décembre 1837, in f.V.C. 242: «J'ai l'honneur de vous offrir le premier livre des Oeuvres de philosophie morale et politique de Confucius et de Mencius dont j'ai entrepris la publication en même temps que celle du Tao-tê king de Lao-tseu dont la première livraison paraîtra très prochainement. Ces deux publications, indépendamment de la traduction des Essais de Colebrooke sur la philosophie des Hindous que j'ai déjà publiée à mes frais, vous donneront la preuve, Monsieur, qu'à défaut de toute autre qualité brillante pour la philosophie je ne manque ni de zèle, ni de dévouement pour fournir des documents à son histoire future». Et encore, au sujet de cette publication, «j'ai cru ne pas pouvoir me dispenser de reproduire le texte complet de ces philosophes, que j'ai entrepris de traduire, en même temps que la plus grande partie du texte de leurs commentateurs que je traduis également, afin de donner à la critique les moyens de s'exercer et aux véritables savants la famille de moyens toujours quand ils le désireront, la traduction des textes et des commentaires, aux textes originaux: contrôle que je crois sensiblement utile pour le progrès de la science».

(2) La querelle débuta par le compte rendu rédigé par Klaproth au sujet du Mémoire sur l'origine et la propagation de la doctrine du Tao, par M. G. Pauthier, Paris 1831, juin 1831, pp. 465-493: «Après avoir démontré, par les critiques consignées dans les notes qui accompagnent la traduction précédente, que M. Pauthier n'est pas encore en état de bien interpréter un texte chinois, il serait inutile de vouloir réfuter les hypothèses qu'il a basées sur sa traduction erronée de la vie de Lao-tseu. Ces hypothèses ont rapport à la ressemblance de la doctrine des Tao-sse avec celle de philosophes de l'Hindoustan. Nous ne pouvons que rejeter ce que nous avons déjà établi au commencement de cet article, savoir que les données nécessaires nous manquent pour nous faire une idée exacte de la doctrine de Lao-tseu et des différentes modifications qu'elle peut avoir essuyées par le contact perpétuel dans lequel se sont trouvés les successeurs du philosophe chinois avec les sectateurs de la doctrine indienne de Bouddha» (art. cit., pp. 489-490). Pauthier répliqua par une Lettre à M. le Rédacteur du Journal Asiatique, août 1831, pp. 131-158: «Vous avez inséré dans le dernier numéro du Nouveau Journal Asiatique, une critique du Mémoire que j'ai publié récemment sur l'Origine et la propagation de la doctrine du Tao, fondée en Chine par Lao-tseu, à laquelle je n'aurais pas répondu, si le nom de son auteur, le ton haut et tranchant de cette critique, n'étaient pas de nature à faire regarder comme autant de vérités, les assertions fausses, et les erreurs nombreuses qu'elle renferme» (art. cit., p. 131). De la part de Klaproth suivront la Lettre au Rédacteur du Nouveau Journal Asiatique et une Seconde lettre, respectivement sur le numéro de septembre et de novembre. Enfin la rédaction fermait la querelle par la note suivante parue dans le fascicule de février 1832, pp. 188-189: «M. Pauthier a adressé à la commission du journal une nouvelle lettre, en réponse aux dernières observations de M. Klaproth. La commission, en ayant pris connaissance, a arrêté qu'elle s'en tiendrait à sa première décision, et qu'elle ne donnerait pas suite, dans son recueil, à une discussion qui semblait se prolonger sans profit pour la science».

(3) Paul Freiherr Schilling von Cannstadt (1786-1837), diplomate, conseiller d'État de l'empereur de toutes les Russies, capitaine de cavalerie, sinologue. Klaproth évoque «la belle collection des livres chinois, mandchou, mongols et tubétains» de celui-ci.

(4) Il est fait référence aux deux passages suivants de l'article de Klaproth paru dans le numéro de septembre 1831: «Cette découverte appartient, non pas à M. Pauthier, mais à M. Abel-Rémusat, qui a déjà imprimé, il y a vingt ans (dans son Mémoire sur l'étude des langues étrangères en Chine, inséré dans le Magasin encyclopédique de Millin) que Fau était l'expression par laquelle les Bouddhistes chinois désignaient Brahma»; «J'invite aussi M. Pauthier à consulter le petit traité intitulé San tsu king, dans lequel les enfans chinois apprennent à lire, et dont le baron de Schilling de Canstadt a publié à St. Pétersbourg une édition magnifique que la Société asiatique possède».